Quatre générations et soixante-quatorze ans séparent Albert Guðmundsson, premier footballeur professionnel islandais, d’Albert Guðmundsson, plus jeune joueur dans le groupe des joueurs convoqués pour la Coupe du monde en Russie. Leur lien ? Albert est l’arrière-grand-père d’Albert, Albert est l’arrière-petit-fils d’Albert. S’ils ne se sont jamais connus, Albert étant décédé en 1994, ils sont intimement liés par l’incroyable histoire footballistique de leur famille. Pour éviter toute confusion avec la particulière généalogie islandaise, rien de mieux qu’un schéma explicatif :
Facile, non ? Précisons également que le prénom Guðmundur et le patronyme Guðmundsson qui en découle sont parmi les plus répandus en Islande… Le reconnu Jóhan Berg Guðmundsson n’a donc aucun lien avec notre Albert ! Passons aux portraits familiaux pour clarifier tout ça…
Albert (Sigurdur) Guðmundsson, premier du nom
Albert naît à Reykjavík en 1923 et commence sa carrière footballistique avec Valur. Entre 1938 et 1944, il remporte cinq championnats d’Islande. Parti ensuite étudier en Écosse, il joue en amateur avec les Glasgow Rangers (pas de compétition officielle pendant la guerre). En 1946, il est recruté par Arsenal mais n’obtiendra malheureusement pas le permis de travail nécessaire à la signature d’un contrat professionnel. Il ne disputera que deux matchs en amateur avec les Gunners, devenant au passage le second joueur étranger à évoluer sous les couleurs du club londonien. Suffisant pour se faire remarquer en France à la suite d’un match face au RC Paris : il signe enfin un contrat pro avec le FC Nancy et entre dans l’histoire du football islandais. La même année, il devient le premier buteur de la sélection islandaise en inscrivant un doublé face à la Norvège (défaite 2-4 le 24 juillet 1947). En Lorraine, il termine meilleur buteur du club. Ses bonnes performances lui ouvrent les portes de la Serie A et du grand Milan AC.
Il y côtoie un illustre joueur nordique, le suédois Gunnar Nordhal, aux côtés duquel il inscrit deux buts en quatorze matchs. Blessé, il quitte le club lombard et revient en France où il poursuit sa carrière au RC Paris (finaliste de la coupe de France en 1950) puis à Nice. Il dispute ses dernières saisons en Islande où il raccroche les crampons en 1958. Malgré son statut de première « star » du football islandais, il ne compte que six sélections. Il devient par la suite président de la fédération islandaise de football de 1968 à 1973 avant de se lancer dans la politique (député, ministre, candidat à l’élection présidentielle…). Sa dernière fonction publique ? Ambassadeur d’Islande en France (1989-1993) ! Albert s’éteint le 7 avril 1994 à l’âge de 71 ans.
Le niçois Ingvi Björn Albertsson
Le fils d’Albert naît sur la Côte d’Azur, le 3 novembre 1952, quand son père joue à l’OGCN. Ingvi Björn évolue cependant en Islande durant l’ensemble de sa carrière, entre 1969 et 1990. Il remporte tous ses titres avec Valur (quatre championnats, trois coupes) et reste aujourd’hui encore le deuxième meilleur buteur de l’histoire en première division islandaise avec 126 réalisations. Il totalise quinze sélections en équipe nationale durant lesquelles il parvient à marquer deux fois. Il s’essaye ensuite au rôle d’entraîneur mais sa carrière dans ce rôle ne connaît pas la même réussite. Il parvient néanmoins à remporter trois coupes consécutives avec Valur au début des années 90. Comme son père, il se lance ensuite dans la politique et devient député au parlement islandais.
Kristbjörg Helga Ingadóttir & Guðmundur Benediktsson, couple foot
Kristjörg est la fille d’Ingvi et, comme son petit frère Albert Brynjar Ingason, elle fait une carrière honnête en Islande (Valur, KR, Fylkir) jusqu’au début des années 2000. Évoluant en attaque, elle compte également quatre sélections en équipe nationale féminine. Son mari n’est autre que Guðmundur Benediktsson, connu dans le monde entier comme « le commentateur fou » de l’Euro 2016. « Gummi », originaire du nord de l’île, débute sa carrière avec le Þór Akureyri. Le milieu de terrain tente sa chance en Belgique à deux reprises mais se fait surtout un nom lors de son passage au KR (1995-2004) où il remporte trois championnats et une coupe. Il remporte encore chacun de ses trophées avec Valur lors de son passage au club (2005-2008). Lui aussi international, il représente l’Islande à dix reprises pour deux buts inscrits. Il s’essaye ensuite au poste d’entraîneur, sans trop de réussite, et s’oriente finalement vers les micros… Pour notre plus grand plaisir !
Au nom de l’arrière grand-père, Albert Guðmundsson
Le nouvelle coqueluche du football islandais fêtera ses vingt-et-un an cet été, la veille du premier match de la sélection dont il sera le plus jeune représentant en Russie. S’il entre en jeu (on a hâte d’entendre les commentaires du père !), vous serez probablement interloqué par son numéro de maillot, peu commun pour un joueur offensif : le… quatre ! Quatre, c’est aussi son nombre de sélections actuel (l’article a été rédigé avant le match amical contre la Norvège NDLR), suffisant pour inscrire trois buts et valider son ticket pour le mondial. Marquer pour son équipe nationale, comme son père, son grand-père et son arrière grand-père, quelle série ! Formé au KR, Albert quitte l’Islande à 16 ans pour rejoindre le centre de formation d’Heerenveen aux Pays-Bas. Deux saisons avec le club frison et le voilà qui rejoint l’un des mastodontes du football hollandais, le PSV Eindhoven.
Il évolue principalement en seconde division avec la réserve du club et sa progression impressionne : 1 but et deux passes décisives en 14 matchs lors de la saison 2015/2016, 18 buts et 4 passes en 34 matchs en 16/17 et 9 buts et 8 passes en 17/18. Des prestations qui lui ouvrent les portes de l’équipe première avec qui il dispute 9 matchs d’Eredivisie (3 passes décisives) et remporte le titre de champion. Son premier mais certainement pas son dernier. Sa carrière s’annonce sous les meilleures auspices et il devrait parvenir à se forger une réputation supérieure à celle de ses parents. Nous sommes impatients de connaître la suite de la saga familiale : verra-t-on un cinquième élément éclore sur les terrains ? Rendez-vous dans une vingtaine d’années !
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