A l’instar des Petits Poucets en Coupe de France, cette équipe d’Islande est aussi inattendue que rafraîchissante. Si loin du continent, ce pays de 300 000 âmes vit en ce mois de juin pour le Championnat d’Europe. Nul doute que ces Vikings se battront corps et âmes pour leur première participation.
La République d’Islande est un Etat insulaire situé au nord du Royaume-Uni, et au nord-ouest de la Norvège. On y trouve un nombre important de volcans et un climat assez froid (de l’ordre de quatre degrés en moyenne). L’islandais est la langue officielle, et se révèle être une langue très dure à apprendre. Un temps candidat à l’adhésion à l’Union Européenne, l’Islande a retiré sa candidature, devant la lenteur des avancées. Cependant, elle reste politiquement et culturellement très liée aux autres pays d’Europe, raison pour laquelle l’équipe nationale islandaise joue les qualifications pour l’Euro ainsi que pour la Coupe du Monde dans la zone Europe.
Avec une population d’un peu plus de 330.000 habitants, l’Islande se classe comme le cent-soixante-quatorzième pays du monde (sur 203) en matière de population. Les températures très fraîches une grande partie de l’année, une population restreinte et une certaine distance avec le continent sont parmi les nombreux obstacles à l’essor footballistique de l’Islande. Malgré tout, et pour la toute première fois, l’équipe nationale d’Islande a réussi à se qualifier pour un Championnat d’Europe, organisé en France. Cette qualification, en plus d’être historique, est surtout plus qu’inattendue. Lors de la précédente campagne de qualification, ils n’avaient marqué que quatre points en huit matches, ne prenant des points que face à Chypre, et en n’inscrivant que six buts. A cette époque, ils ne se classaient que quatre-vingt-dixième au classement FIFA. Aujourd’hui, ils se classent en trente-cinquième position, et avaient même réussi à arriver en vingt-troisième position en Juillet 2015. Un authentique exploit pour ce pays de trois cent mille âmes. Mais, comment expliquer qu’en quatre ans, qu’ils aient pu gagner cent places au classement FIFA, dépassant aujourd’hui la Suède, le Danemark, la Norvège et la Finlande, dont les championnats sont tous professionnels (alors que la Première Division Islandaise n’est que semi-professionnel). Retour sur les évolutions du football islandais, de Reykjavík à Geoffroy-Guichard le 14 juin, pour leur premier match dans une grande compétition.
Une génération islandaise qui s’exporte
L’essor du football islandais peut s’expliquer par plusieurs facteurs. La sélection nationale a rarement eu dans ses rangs autant de bons joueurs, qui jouent dans de nombreux grands championnats. On citera Kolbeinn Sigþórsson, avant-centre de Nantes, Ragnar Sigurðsson, défenseur du FK Krasnodar, Alfreð Finnbogason, attaquant d’Augsbourg et meilleur buteur du championnat néerlandais en 2014 mais surtout Gylfi Sigurðsson, qui se trouve être le maître à jouer de cette sélection islandaise, et qui est indispensable, aussi par la qualité de ses coups de pied arrêtés. Le meneur de Swansea connaît, à vingt-six ans, sa meilleure saison sur le plan personnel avec onze buts en vingt-quatre matches, et cette forme profite aussi à la sélection. Autant dire qu’il devra être performant pour espérer sortir des poules. De plus, il ne faut pas oublier le vétéran Eiður Smári Guðjohnsen qui, à 37 ans, apporte toute son expérience à un groupe pas habitué au plus haut niveau européen. Cette diaspora islandaise, aux quatre coins de l’Europe (outre les pays scandinaves, on trouve des sélectionnés en Italie, en Angleterre, en Turquie, en Russie ou en Allemagne), est devenu une sélection en tout point professionnelle, ce qui n’était pas le cas lorsque les appelés jouaient principalement au pays.
Une vrai volonté nationale
L’encadrement technique joue une part importante dans la réussite islandaise. L’arrivée de Lars Lagerbäck, et son association, assez insolite, avec Heimir Hallgrímsson, coach et dentiste de son village, a créé un mélange d’expérience internationale (sous la houlette de Lagerbäck, la Suède a participé à deux Coupe du Monde et trois Euros) et de connaissance du pays (Hallgrímsson a passé toute sa carrière de joueur et d’entraîneur en Islande). Malgré l’expérience du Suédois, on les considère plus comme un duo, que comme un entraîneur et son adjoint. D’ailleurs, l’Islandais prendra seul la charge de la sélection après l’Euro et la retraite de Lagerbäck.
Le football islandais profite aussi du récent soutien du public, qui n’a que récemment attrapé le virus football. Cette ferveur vient en partie d’un match de 2013, alors que la sélection se déplaçait en Suisse. Après l’ouverture du score de Guðmundsson dans les premières minutes, la Suisse se réveille et mène 3-1 à la mi-temps, et même 4-1 à la 54e minute. Mais les Islandais possèdent une mentalité qui les pousse, malgré une différence de niveau à priori très importante avec leurs adversaires, de ne jamais partir perdants. Ce jour là, Guðmundsson inscrira un triplé, et l’Islande arrachera un nul incroyable 4-4 avec la Nati. Près des trois quarts du pays regardera le barrage face à la Croatie, qui se qualifiera de peu. La sélection islandaise est probablement née ce jour là.
KSI, la fédération islandaise de football, et son président depuis 2007, Geir Thorsteinsson, sont à remercier pour le développement du football en Islande. Le climat a longtemps été un frein à ce développement. Comment peut-on vouloir des joueurs professionnels s’il est impossible de s’entraîner dans de bonnes conditions toute l’année ? S’ils ne pouvaient évidemment pas changer le climat de l’île, ils se sont dits qu’il était possible de l’aménager. Depuis 2002, l’Islande s’est attelé à construire des terrains entiers, en intérieur, dans des genres de halls géants, qui ont permis une amélioration des conditions d’entraînement des joueurs. A ceux-là se sont ajoutés 20 terrains synthétiques et plus de 130 mini-terrains, principalement pour le développement du sport dans les écoles et dans les différentes communautés. Sans aucun doute, la remontée fantastique de l’Islande au classement FIFA, n’est pas un coup de chance mais bel et bien l’aboutissement d’un formidable projet, débuté dans les années 90 par KSI.
Cependant, l’Islande reste à ce jour, le point de départ dans le développement des joueurs ayant un niveau leur permettant d’espérer faire une bonne carrière. Ces joueurs partent assez rapidement, principalement en Norvège et en Suède mais aussi en Angleterre ou aux Pays-Bas. De ce fait, il est difficile de développer un championnat, à ce jour semi-professionnel. Les jeunes joueurs, à l’image de leurs aînés, savent que le succès passe par le départ. Cela bénéficie grandement à l’équipe nationale, qui récupère des joueurs ayant l’expérience des plus grands championnats, mais le championnat est voué à stagner, ce qui empêchera les équipes de bien figurer dans les compétitions européennes. A titre d’exemple, cette saison, le Víkingur Reykjavik a été éliminé au premier tour de qualifications de la Ligue Europa par un club slovène, et Stjarnan, champion en titre, au même stade mais en Ligue des Champions. Mais qui pensait il y a quelques mois seulement que l’Islande se qualifierait pour l’Euro 2016, devant la Turquie et les Pays-Bas ?
De par la mentalité de ses joueurs, la mentalité de tout un pays, l’Islande étonne, loin du football business, loin des millions d’euros. Loin du vieux continent, aussi. comme le dit Hallgrimsson , il y a tellement peu d’habitants en Islande que l’on ne peut pas laisser tomber un joueur qui n’est que moyen, car, demain, il sera peut-être le meilleur joueur de l’équipe. La victoire n’est pas ce qui compte le plus là-bas. Le football est encore amateur, et ils le revendiquent comme une fierté. Cette équipe est prête à se battre contre vents et marées. Après tout, qu’est ce qu’un peu de vent lorsque l’on a pris l’habitude de jouer au football sous des températures négatives ? Certes, cette équipe d’Islande n’est pas la plus glamour, ni la plus technique, ni la plus belle à voir jouer. Mais son histoire et sa culture en font une sorte d’anti-héros, que l’on rêve tous de voir aller loin dans la compétition. L’unité, l’esprit d’équipe et la passion pour son pays seront les principales armes du plus petit pays à se qualifier pour une phase finale de championnat d’Europe. Alors que différents scandales éclatent en Europe, ces qualités ne peuvent être ignorées. Elles participent à rendre au football, l’image que l’on aime de ce sport. L’image d’un sport où le Petit Poucet, parfois, gagne.
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Je viens de vous découvrir après avoir fait quelque recherche sur l’Islande après leur match nul face au Portugal. J’ai d’abord été sur votre compte twitter et je suis venu ici après et j’ai adoré votre article sur l’Islande.
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