Expatrié en Finlande depuis la fin des années 1970, Keith Armstrong, l’anglais populaire dans son nouveau pays a fait beaucoup parler de lui. De ses débuts glorieux à Oulu puis au FC Kuusysi, il a disputé près de 250 rencontres. Au quatre coins de la Finlande il a aussi porté tous les clubs qu’il a entraîné vers la gloire en remportant de nombreux titres, ce qui lui a valu le surnom de « Goldfinger ». Derrière tout ces sacres se cache un homme plein d’amour, mais aussi particulier, parfois incompréhensible. À ce jour, il entraîne le club du FC Haka à Valkeakoski, en deuxième division finlandaise.
Dans le nord de l’Angleterre, près de Newcastle, Keith Armstrong tape dans le ballon à longueur de journée depuis son plus jeune âge. Une passion qui va devenir son métier.
En octobre 1977, il dispute sa première rencontre au sein de la deuxième division anglaise avec Sunderland en tant que jeune espoir. Plus une opportunité qu’un souhait pour le jeune joueur qui évolue dans le club rival de son équipe de cœur : Newcastle United FC. Malgré tout, l’ailier anglais est prêté à Newport County puis à Scunthorpe United pour avoir plus de temps de jeu.
Après plusieurs apparitions parfois remarquées, il réalise son rêve en signant à Newcastle. Mais son aventure dans sa nouvelle équipe fut courte. En plein hiver, son entraîneur le convoque pour lui proposer une destination peu commune. A l’époque, son coach avait promis de prêter l’un de ses joueurs en Finlande. Celui-ci devait envoyer Jim Pearson dans le nord de l’Europe, malheureusement son joueur se blesse. Compte tenu de ces circonstances, Keith se voit suggérer de rejoindre la Finlande. C’est au Oulun Palloseura (OPS) qu’il évoluera, après un accord avec le club anglais.
Un pari plus que réussi
À son arrivée à l’aéroport d’Helsinki, Keith est gelé et doit prendre la route vers le nord. En effet Oulu se trouve au sud de la Laponie. Il y réalise de très bonnes performances dans un championnat beaucoup moins professionnel, et se voit sacré champion de Finlande.
De retour en Angleterre, OPS tente de convaincre Armstrong de signer définitivement. L’anglais qui n’est plus désiré à Newcastle rejoint dans un premier temps Hong Kong et le Bulova SA. Mais après mûre réflexion, il décide de revenir à Oulu. Rapidement, il enchaîne les victoires. Les supporters et les journalistes le surnomment « Keke » car comme il l’explique, les gens en Finlande n’arrivent pas à mettre leur langue derrière leurs dents, et de ce fait, n’arrivent pas à prononcer le « th » de son prénom !
Pour sa deuxième année en Finlande, Armstrong et OPS sont qualifiés pour la Coupe d’Europe. Ils doivent recevoir chez eux un club mythique, considéré comme le plus grand club de l’époque, Liverpool. Un match assez particulier pour l’anglais expatrié en Europe du Nord. Dans le stade qui compte 7000 places, et seulement quelques unes assises, des personnes de tout le pays et même des pays voisins (principalement de Suède) s’amassent autour du terrain. Ils sont plus de 15 000, un record largement battu pour le club. Lors de ce match aller, OPS obtient un précieux nul face à Liverpool, sur un score inespéré de 1 partout. Au retour, dans les îles Britanniques, Keith et ses coéquipiers vont manger dans un restaurant chinois à la veille du match le plus important de leur carrière. Ils vont mêmes terminer leur soirée dans un pub typique de la région. Le lendemain, ils découvrent que toutes leurs affaires pour le match sont engorgées d’eau. Juste avant le début de la rencontre, ils sèchent leurs maillots, chaussures… Au final, OPS perd lourdement 10 à 1, mais cela reste une satisfaction pour tous d’avoir pu affronter une telle équipe. L’année se termine en apothéose avec un nouveau titre de champion, le second de l’histoire du club et de Keith.
Par la suite il partira en direction de Kupio dans l’est de la Finlande, au Koparit Kuopio avant de revenir pour des raisons familiales à OPS. En 1984, il s’engage avec le plus important club du pays du début des années 1980, au FC Kuusysi. Il dispute une coupe européenne et remporte le championnat. Avec plus d’un but par match, il attire l’attention de nombreux médias à l’étranger. Il va ensuite atterrir dans quatre autres équipes différentes, avant de signer à l’IFK Mariehamn, aux Åland en 1990. A cette période, Armstrong est moins performant et des problèmes personnels, d’ailleurs il va quitter sa femme. Il est sur le point de partir de Finlande, mais soudain, une offre venant de Laponie apparaît. Dans la ville du Père Noël, RoPS aimerait le relancer. Keith n’est pas forcément emballé à l’idée de continuer ici, mais son amour pour le pays des milles lacs lui fait changer d’avis. Au total, il disputera plus de 250 rencontres en Finlande et inscrira près de cent buts dans neufs équipes différentes.
Un nouveau défi pour « Goldfinger »
À l’âge de 35 ans, Keith Armstrong raccroche les crampons et se voit déjà au bord des terrains en tant qu’entraîneur. Durant ces deux années à Rovaniemi, il est déjà conseiller en plus d’être joueur. Pour autant il ne trouve pas de poste pour entraîner une équipe. Il prend finalement le poste de coach au TP-Seinäjoki qui évolue en Veikkausliiga, où il avait déjà joué lors de sa carrière de joueur. Descendu en Ykkönen (D2), il remporte le championnat, mais décide de partir. Lors de son départ, après un match, ses joueurs lui offrent un maillot rayé noir et orange numéroté « 13 » dans le dos. Le nombre floqué aurait été arraché car Armstrong est superstitieux.
En 1997, le FC Haka lui propose une offre qu’il accepte. Relégué en deuxième division, Keith reprend l’équipe qui évolue dans la division nord, et qui n’a à son actif plus que dix joueurs sous contrat. Il termine leader et il est promu dans l’élite du football finlandais. La légende est en marche, Armstrong remet sur pied le FC Haka et va remporter à trois reprises le championnat. Il est désigné manager de l’année 1999 et 2000 après le deuxième et troisième titre de son équipe. En quatre ans, le FC Haka termine à chaque fois en première position, ce qui va valoir à Keith Armstrong le surnom de « goldfinger », traduit par l’homme qui transforme en or tout ce qu’il touche ! Cependant, il ne réussira jamais l’exploit d’atteindre les phases de poules d’une coupe européenne. Son meilleur parcours sera un 3ème tour préliminaire de Champions League contre Liverpool.
Une réussite dont l’anglais ne se cache pas, et que les finlandais admirent. Il va même par sa popularité commenter des matchs de l’équipe nationale lors des qualifications à la Coupe du Monde 1998 et à l’Euro 2000. Les spectateurs découvrent une autre personne, qui s’illustre par ses connaissances footballistiques. Le match entre son pays natal l’Angleterre et l’Argentine sera un grand moment, lui qui a les larmes aux yeux en direct durant la phase de tirs au but. Keith cherche toujours la réussite, pour cela il est strict sur la discipline et très superstitieux comme avec son cadeau de départ de Seinäjoki. Entre autre, pour le choix des numéros de ses joueurs par exemple, aucun ne doit jamais porter le treize. De plus, chaque vendredi 13 il annule l’entraînement et si possible le match. Sa voiture doit être garée tout les jours à la même place. Si un entraînement pour la préparation d’un match a été réussi, alors ses joueurs doivent utiliser les même maillots pour l’échauffement d’avant match… Tellement fétichiste qu’il en rigole quand on lui en parle. Toutefois cet entraîneur arrogant peut parfois énerver certaines personnes.
Sans poste après une année compliquée au FC Haka, le rival qui veut retrouver le chemin du triomphe se tourne vers Armstrong. Le HJK Helsinki remporte le championnat dès la première saison avec Keke à sa tête. En 2003, il va même réaliser le doublé coupe-championnat : sa deuxième coupe nationale et son cinquième et dernier titre remportés. Les années suivantes sont un peu plus mitigées même si le HJK se positionne souvent second en Veikkausliiga et remporte une nouvelle coupe de Finlande en 2006. La seule chose qu’il lui manque est de la réussite à l’échelle continentale où il bute sur le troisième tour préliminaire qui devient le tour maudit du club de la capitale.
Une image dégradée
Armstrong participe en 2006 à une émission de danse en Finlande qui ressemble à « Danse avec les stars » en France. L’année suivante, le HJK patine dans le milieu du classement. Les supporters du club sont mécontents des résultats et du spectacle proposé à domicile, un jeu très défensif qui ne convient pas non plus à la direction. Le HJK termine alors la saison en huitième position. C’est ici que se séparent les chemins du club de la capitale et de Keith. Après ses nombreux succès, Armstrong décide de faire une pause dans sa carrière d’entraîneur. Il devient un expert du football sur les chaînes télévisées finlandaises. Il est notamment consultant et commentateur pour C More Entertainment (groupe Scandinave) et pour Nelonen où il commente la Première League anglaise sur Englannin Valioliiga et la Champion League.
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On retrouve l’anglais en 2012 en tant que directeur sportif pour épauler le nouvel entraîneur Simo Valakari à SJK, ce même club qui est né de la fusion de deux anciennes équipes de la ville, dont le TP-Seinäjoki qu’il avait entraîné auparavant. Il a pour objectif de faire progresser ce club ambitieux vers les sommets du foot finlandais. En deux saisons, le travail qu’il a fourni semble payer avec une montée en première division et une deuxième place l’année suivante en Veikkausliiga. À cela s’ajoute également une coupe nationale, ainsi que la notoriété montante du club en Finlande.
Tout compte fait, l’aventure en reste là et Keith redevient entraîneur cette fois ci au FC Ilves Tampere. Tout juste promus dans l’élite, le club se penche sur Keith qui aura pour mission de maintenir le club et qui devra leur apporter toute son expérience. Coincé dans le milieu du tableau, Ilves est menacé par la relégation. En Octobre, alors que la fin de saison approche, son équipe doit affronter un certain SJK, qui eux sont dans la course pour le titre. Dans un match très important donc, Keith Armstrong est introuvable. La rencontre se déroule sans lui et Ilves s’incline 2 buts à 1 contre le futur champion. On apprendra au cours du match que l’anglais était en train de commenter un match de Premier League sur la chaîne télévisée finlandaise MTV Sport. A la suite de cet événement, les supporters sont remontés et les dirigeants vont, deux jours plus tard, annoncer le licenciement d’Armstrong. Une aventure qui s’arrête prématurément et qui aurait pu avoir une tout autre issue.
Contesté par de nombreux finlandais, des offres intéressantes lui parviennent de l’étranger, principalement d’Amérique. Mais Keith s’est habitué au pays, parle couramment sa langue, a adopté sa culture et a même obtenu la nationalité finlandaise il y a 26 ans… Il a également rencontré sa femme dans le pays et souhaite avant tout le bien de sa famille. Il n’a donc pas envie de partir. Pour le bien de sa famille également, il accepte l’offre de Haka, sa première expérience en tant qu’entraîneur. Depuis décembre dernier, il a repris l’équipe qui joue en Ykkönen (D2) et souhaite bien retrouver les sommets du football finlandais.