Absente des compétitions internationales depuis l’Euro 2000, la Norvège entame la toute fraîche Ligue des Nations avec appétit et ambition. À la tête d’une équipe jeune et prometteuse, Lars Lagerbäck entend bien redonner ses titres de noblesse au football du Royaume.
Lorsque le sélectionneur Per Mathias Høgmo présente sa démission en novembre 2016 après trois ans de service, l’équipe de Norvège est en chantier. Engagée dans le groupe C de qualification à la Coupe du Monde avec l’Allemagne, la République Tchèque, l’Irlande du Nord, l’Azerbaïdjan et Saint-Marin, elle ne compte que trois points après quatre journées. Une victoire 4-1 obtenue face à l’enclave du territoire italien.
Lars et la manière
À la recherche d’un architecte capable de (re)construire un édifice solide sur ces bases fragiles, la fédération convainc Lars Lagerbäck de prendre les commandes du projet. Le Suédois, qui avait quitté l’Islande sur un quart de finale historique pour le pays à l’Euro 2016, est une valeur sûre du football nordique et doit apporter un vent d’optimisme et de fraîcheur à une sélection qui en manquait quelque peu. La Norvège ne compte aujourd’hui pas de star mondiale ni de joueur d’une aura équivalente aux Solskjaer, Carew ou autre Riise. En revanche, elle dispose d’une génération de jeunes talents dont le technicien entend tirer le meilleur. Preuve en est, la présence de six joueurs de 23 ans ou moins dans sa dernière liste.
Si le premier rassemblement du nouveau sélectionneur se solde par une défaite 2-0 en Irlande du Nord avec un groupe largement remanié, la suite est plus encourageante. Après les trois petits points engrangés lors de la phase aller des éliminatoires, la Norvège en obtient 10 sur les rencontres retour, ne s’inclinant qu’en Allemagne, certes lourdement (6-0). Le plus gros carton de l’ère Lagerbäck sera à nouveau infligé aux Saint-Marinais qui concèderont un 0-8 aux vikings. Insuffisant cependant, pour espérer une participation au Mondial russe. L’équipe progresse et assoit petit à petit le 4-4-2 cher à son stratège. Même s’il n’a pour l’instant jamais aligné la même équipe deux matchs de suite, les contours d’un groupe semblent se dessiner, notamment autour de ses jeunes pépites.
Une classe biberon taille patron
Au centre de ce système, un garçon se fait rapidement une place de choix. Le jeune (20 ans) Sander Berge, déjà pièce maîtresse du KRC Genk en Belgique, est appelé dès la première liste de Lagerbäck, en mars 2017. Il devient naturellement un pilier de l’entrejeu. Auteur de prestations de haute volée, aussi bien en club qu’en équipe nationale, il attire les regards des plus grandes écuries et laisse son sélectionneur sous le charme. Ainsi, même durant ses 7 mois d’indisponibilité suite à une grave blessure aux ischio-jambiers, il est invité à se joindre au groupe lors de rassemblements internationaux. Désormais de retour, il assure avoir « réussi à revenir plus fort » et ajoute « J‘ai eu le temps d’exercer mon corps de manière optimale, mais aussi d’avoir une autre perspective du monde du football. Vous pouvez le prendre pour acquis, mais une telle blessure vous fait apprécier davantage le foot. Globalement, la période a fait de moi un joueur encore meilleur ». Ça promet !
… og til alle dere som lurer på hvordan det går med Sander Berge. He is on his way ??? #beastmode #sterkeresammen pic.twitter.com/f38uIm2GPT
— Fotballandslaget (@nff_landslag) March 27, 2018
Martin Ødegaard, le phénomène engagé à 15 ans par le Real Madrid contre 4 millions d’euros, a lui aussi été appelé en mai dernier, bien que forfait. Un moyen pour Lars Lagerbäck de montrer à ses jeunes pousses qu’il compte sur elles, tout en les responsabilisant au sein du collectif. Titulaire indiscutable la saison passée sur l’aile d’Heerenveen mais toujours sous contrat avec le Real, Ødegaard, 20 ans en décembre, poursuit sa progression et passera cet exercice sous le maillot du Vitesse Arnhem à la faveur d’un nouveau prêt. « Il a un grand potentiel et il est l’un des joueurs les plus techniques que je n’ai jamais vus. Avec plus d’expérience, je pense qu’il peut être vraiment un joueur de classe mondiale » déclarait le Suédois à Goal il y a quelques mois. Alors qu’Heerenveen semblait vouloir renouveler son bail, le joueur a préféré rejoindre le Vitesse qui lui offrait son poste préférentiel de meneur de jeu.
Autre talent de la génération 98, Kristoffer Ajer s’affirme jour après jour dans la défense centrale du Celtic Glasgow et débarque logiquement en sélection en mars dernier. Ses quatre capes se sont soldées par des succès face aux mondialistes panaméens, islandais et australiens, ainsi que contre l’Albanie. Du haut de son mètre quatre-vingt-seize, ce roc sécurise une défense dans laquelle s’intègre également le très intéressant Birger Meling, latéral gauche de Rosenborg âgé de 23 ans, auteur cette saison d’un but et sept passes décisives en Eliteserien.
Avec le virevoltant Mohamed Elyounoussi (24 ans) devant lui, ce couloir pourrait s’avérer particulièrement attrayant. L’ailier né au Maroc a quitté Bâle pour Southampton cet été contre 18 millions d’euros et devrait bénéficier d’un temps de jeu conséquent qui lui permettrait de passer un cap supplémentaire. Le solide attaquant Alexander Sørloth (22 ans, Crystal Palace) a lui rejoint l’Angleterre en janvier, en provenance de Midtjylland. Son physique taillé pour les joutes de Premier League – 1 m 93 sans talonnettes…- lui a permis de se montrer plutôt convaincant lors de ses apparitions. Avec 12 buts en 33 sélections et déjà plusieurs saisons Outre-Manche, Joshua King (26 ans), devrait quant à lui être le leader de l’attaque norvégienne pour les prochaines échéances.
Côtés Ligue 1, Ole Selnaes peut également voir l’avenir sereinement. Malgré une forte concurrence à son poste avec entre autres Berge, Stefan Johansen (27 ans, 41 sélections) ou Markus Henriksen (26 ans, 39 sélections) qui ont fait oublier les trentenaires Skjelbred et Tettey, le milieu de l’AS Saint-Etienne compte déjà 17 capes à 24 ans, et devrait en voir arriver d’autres.
La promesse Håland
Même s’il n’est pas retenu pour ces premiers matchs de la Ligue des Nations, comment parler de l’avenir sans citer Erling Braut Håland ? Ayant fait l’objet d’une offre de 5 millions d’euros de la Juve l’hiver dernier, cet autre beau bébé de 18 ans et 1 m 91 sous la toise, s’est finalement engagé en faveur du RB Salzbourg voilà quelques semaines, pour une somme avoisinant les 10 millions d’euros, bonus inclus. Déjà auteur de 9 buts et 4 passes décisives en 19 matchs d’Eliteserien avec Molde cette année, signant notamment un quadruplé en 17 minutes, le garçon rejoindra l’Autriche à la fin du championnat norvégien. « Bien sûr, je l’ai vu plusieurs fois et c’est un joueur prometteur […] actuellement il n’est pas dans l’équipe, mais c’est un joueur passionnant » avouait Lagerbäck. Néanmoins, le sélectionneur attend de lui plus de régularité et de références à haut niveau. Pour l’heure, il tentera de faire ses preuves avec les U21.
Parmi d’autres, ces joueurs marquent le renouveau d’une Norvège plongée il y a deux ans dans le brouillard d’une 83e place au classement FIFA, bien loin du 1/8e de finale de Coupe du Monde atteint en 1998. Aujourd’hui, après 7 victoires, 2 nuls, 4 défaites et trente places gagnées sous la houlette de Lars Lagerbäck, elle veut croire à un ciel plus bleu. Plus Rouge et Bleu. Bien sûr, le travail ne fait que commencer. Avec huit joueurs comptant moins de 10 sélections, le staff a beaucoup à régler, tant à peaufiner. Mais rarement la Norvège n’avait paru si bien armée pour retrouver l’adrénaline d’une grande compétition. La Ligue des Nations qui débute ce soir face à Chypre au Ullevaal Stadion est un chemin pour y parvenir. Dans un groupe où ils retrouveront aussi la Bulgarie (dimanche à Sofia) et la Slovénie, les hommes de Lagerbäck vont devoir confirmer leurs progrès. Invaincus à domicile depuis l’arrivée du Suédois, restant également sur quatre victoires consécutives, ils seraient bien inspirés de poursuivre ces bonnes séries.
Photo mise en avant : Terje Pedersen